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dimanche 27 novembre 2016

Melrose Place

"Tough girl, I'm in pain
It's lonely at the top, black outs and airplanes
And I still pour you a glass, of champagne
Tough girl whose soul aches
I'm at home, on my own
Check my phone, nothing, though
Act busy, you order in
Pay TV, it’s agony

  I may cry ruinin' my makeup
Wash away all the things you've taken
And I don't care if I don’t look pretty
Big girls cry when their hearts are breaking" Sia


J'ai peur, je voudrais récupérer la clé de chez moi, je voudrais récupérer la clé de mon cœur. 
Je voudrais me barricader et me cacher.
Je voudrais jeter mon téléphone par la fenêtre, pour ne pas passer mes journées, mes soirées, les yeux rivés dessus.
Je voudrais lentement peser le pour et le contre, lentement effectuer mes provisions du cœur et ne plus jamais les céder, même pas pour le moindre dollar, même pas pour le moindre sourire aguicheur ou de belles paroles sorties de nulle part, qui n'ont, en définitive aucune valeur.

Je voudrais être en 2006. On ne savait pas que nos vies ressembleraient à ça.
Tu te souviens comme nous étions confiantes? Comme nous pensions, que passé la trentaine, tout serait plus simple, on aurait construit de belles choses, avec de belles personnes et on ne se poserait plus de question.
Mais nous nous sommes trompées au final.
Nous pensions que si c'était pas celui là, ça serait un autre.
 Nous pensions, qu'une fois, le précieux sésame obtenu, la mutation dans le Sud-Ouest, tout serait plus simple. Mais c'était faux.
C'était, il y a dix ans que tout était plus simple.
Pourquoi donc? Parce-que nous étions confiantes.
Parce-que nous savions, qu'il nous attendait des trucs incroyables. Il y en a eu, évidemment.
Mais j'ai la sensation, ce soir, d'avoir répété toujours les mêmes erreurs, d'avoir effectué toujours les mêmes mauvais choix.
Ah ça non, on n'avait pas pensé au fait que dans la construction, parfois, il y a aussi la déconstruction.
Qu'elle demande du temps, ou peu, et qu'au final, c'est toujours la même chose, toujours la même douleur, toujours le même chagrin, qui se dissipe, au fil du temps et des bons moments passés ensemble.
Sauf qu'aujourd'hui, nous ne sommes pas tout le temps ensemble.
Et c'est peut-être cela qui fait que c'est tellement difficile.
Faire en sorte que les jours passent, avec toujours cette horrible angoisse du temps.
C'est vrai, un jour de passé, c'est un jour de gagné sur notre vie.
Sauf qu'on est plus tout le temps ensemble.
Tu te souviens comme on guettait l'arrivée de l'une, de l'autre, à la coloc.
Tu te souviens comme on riait de se voir. Des fois, on s'engueulait aussi, je te détestais et toi... Toi, forcément, t'avais envie de me filer des gifles.
Et tu te souviens comme on se moquait, comme on riait.

On riait fort, partout, dans le salon, dans la rue, chez Monop, lorsqu'on revenait les bras chargés de gâteaux, de chocolat, de sauciflard, j'en passe et des meilleurs.
Dois-je rajouter, qu'à cette époque, nous ne prenions pas un gramme non plus, ah la belle époque.
On riait tellement, tu te souviens, au jardin du Luxembourg, quand j'avais refusé de céder ma chaise, sur laquelle reposaient mes pieds.
T'en revenais pas, tu m'avais regardée par-dessus tes lunettes de soleil et tu m'avais chuchoté: "Mais en vrai, t'es une connasse!"
On riait quand on revenait de soirée, et que je disais à 10h du matin, à la boulangère, "Bonsoir, une chocolatine s'il vous plaît".
On riait si fort quand tu disais aux mecs qui te draguaient: "Dégage, tu m'dégoutes!".
Mon Dieu, j'aurais du en prendre de la graine, tiens.

Mais tu sais, je vais faire mon utopiste.
Y a des jours, où je me demande si ça ne serait pas plus simple qu'on habite toutes dans une résidence Melrose Place.
Je m'explique. On y vivrait, toi, moi, et toute une bande de copines. Nous et les gosses.
Je ne me traînerai pas ma solitude au moins. 
On serait toute une clique de gonzesses, à organiser des virées au parc, à la plage, aux structures gonflables qui puent des pieds.
Tous nos enfants s'éclateraient ensemble, et pendant ce temps, on referait le monde et on rirait tellement.
Le soir, bien entendu, chacune chez soi, les devoirs, le bain, le repas, puis une fois, les gosses couchés, on se retrouverait pour boire un verre, mater un film ou discuter, dans l'appartement de l'une ou de l'autre.
Mais surtout, il n'y aurait pas de mari, pas de chaussettes sales, de rugby à la télé, d'entraînement, de retour de beuverie, de déception ou de prise de tête.
On aurait des droits de visite, des amants de passage, sans lendemain, et surtout pas de prise de tête.
Et lorsque l'une d'entre nous, aurait conclu, il y aurait conseil de guerre dès le lendemain afin de partager tous les détails les plus croustillants.
Comme il y a dix ans, tu te souviens?
Tu te souviens de cette fois, où parce-qu'un goujat n'avait pas voulu me déposer, j'avais cherché la bouche de métro pendant une demi-heure sous la pluie.
Tu pleurais de rire, lorsque j'étais rentrée excédée.

C'était plus simple, on s'enfoutait parce-qu'on était nous. 
Parce-qu'on avait de la bienveillance l'une envers l'autre, et qu'on savait se dire les choses et se parler.
Il y a toujours eu beaucoup de bienveillance et d'honnêteté entre nous.
L'autre jour, je me posais des questions et tu m'as dit, entre autre, que je devais cesser de calculer, que je devais être moi parce-que c'est comme ça que tu m'aimais, avec mes défauts et mes qualités.
Et que si quelqu'un m'aimait vraiment, il n'aurait pas d'autre solution, que de me prendre, toute entière, avec mes valises, mes casseroles, mes coups d'éclats mais surtout, avec tout ce qu'il y avait de positif.
Et tu as tellement raison.
Quand j'y pense, t'as toujours été là. Parfois, tu m'as dit," mais je ne sais pas quoi te dire moi". 
Mais tu es restée là. Tu m'as proposé de venir même, de tout plaquer pour venir, juste pour me serrer dans tes bras, ou tenter de me faire marrer, en jouant du crayon. Tu te souviens de cette connerie, même dix ans, après, avec Yannick, on en parle encore.
Tu m'as écoutée, tu m'as écoutée pleurer, parfois, tu m'as dit ce que je voulais entendre juste pour m'apaiser aussi.
Tu m'as souri, tu m'as parlé de toi aussi. Et moi, j'aime quand tu me parles de toi. Je voudrais être là aussi.
Et puis, on a même réussi à rire quand il n'y avait plus d'espoir, et plus matière à rire, et si tu savais.
Si tu savais comme je serais anéantie sans toi dans ma vie. 
Je repense souvent à cette fois, où l'on était en deuxième année de fac, que j'avais peur de toi.
Cette fois où tu m'avais klaxonné en voiture en me faisant mille coucous, et que je m'étais demandé "qu'est-ce qu'elle me veut celle-là".

Et si tu savais, à quel point, je ne regrette pas ce soir à la Feria, où tu étais venue me parler,  et où décontenancée, étonnée, je t'avais proposé de venir boire l'apéro chez moi.
J'avais découvert bien loin de l'image de garçon manqué que tu véhiculais, la personnalité d'une vraie fille, d'un vrai potentiel de copine;
Si tu savais, à quel point, je ne regrette pas, parce-que parfois, ce que je me dis, c'est que mon grand amour, c'est toi...


"Oh, why you look so sad, the tears are in your eyes,
Come on and come to me now, and don't be ashamed to cry,
Let me see you through, 'cause I've seen the dark side too.
When the night falls on you, you don't know what to do,
Nothing you confess could make me love you less" The Pretenders